Lors du repas du 23 mars 2017, au Sofitel Arroyo de Buenos Aires (Argentine), le chef Olivier Falchi a servi un repas dont j'ai brièvement exposé le menu dans un autre billet.
J'ai notamment expliqué quelques unes des recettes, mais il y avait la presse du retour, une semaine d'administration en souffrance, de sorte que j'ai été rapide.
Aujourd'hui, donc, je reviens sur un des plats qui était nommé "chou-fleur-olli". De quoi s'agit-il au juste ?
En 1987, je me suis intéressé à l'aïolli, et j'ai vite compris qu'il y avait des confusions entre les aïollis véritables, et de faux aïollis, qui sont en réalité des des mayonnaises à l'ail.
L'aïolli véritable, l'aïolli populaire, est apparenté au "beurre de Provence", qui est déjà signalé par Menon, dans les Dons de Comus, en 1742. Il s'agit de piler de l'ail cru avec de l'huile d'olive, dans un mortier, à l'aide d'un pilon. L'opération est longue, et elle conduit à une sauce qui a la viscosité d'un beurre mou.
Comme l'aïolli est une sauce "fragile", qui peut tourner en huile, certains ont empiriquement ajouté du pain trempé dans du lait, des pommes de terre cuites, ou de l'oeuf, tous ingrédients qui contiennent l'eau qui est indispensable à l'émulsion, laquelle est obtenue par dispersion de gouttes d'huile dans de l'eau.
Cela dit, progressivement, une pratique fautive de mayonnaise à l'ail s'est installée, avec un goût bien différent du goût de l'aïolli. Or c'est le goût qui est déterminant en cuisine, n'est-ce pas ? Bref, un aïolli, ce n'est pas une mayonnaise où l'on met de l'ail (et je fais ici l'impasse sur la confusion entre mayonnaise et rémoulade, si fréquente !).
Ayant vu tout cela, donc, je m'étais demandé pourquoi l'ail permettait de faire des aïollis, et j'avais d'abord exploré la même recette à partir d'oignon : un mortier, un oignon, on le pile, on continue de piler en ajoutant de l'huile... et c'est ainsi que j'ai obtenu ce que j'ai alors nommé un "oignolli". Puis, par le même procédé, un échalotolli.
J'étais content, mais, au fait, pourquoi ces possibilités ? Parce que les tissus végétaux sont composés d'eau (jusqu'à 99 pour cent dans une salade) enclose dans les "cellules", lesquelles sont des sortes de petits sacs, limités par une membrane et par une parois. La membrane ? Elle est fait de "phospholipides", composés merveilleusement adaptés à la confection des émulsions. La paroi ? Elle inclut des protéines, lesquelles sont également très utiles pour les émulsions.
De ce fait, tous les tissus végétaux ou animaux étant environ constitués des mêmes composés, je me suis dit que l'on pouvait faire des émulsions à partir de n'importe quel ingrédient : viande, poisson, légume, fruit... Et c'est exact que cela fonctionne très bien ! Avec les viande, on fait du "viandolli". Avec les poissons, du poisonnolli. Avec du chou-fleur ? Du chou-fleur-olli !
Et c'est ainsi que j'ai proposé à Olivier Falchi de détourner sa recette initiale de chou-fleur. Il a donc cuit le chou-fleur dans du lait, puis il a ajouté de l'huile goutte à goutte au légume broyé; tandis qu'il fouettait. L'émulsion a été obtenue sans aucune difficulté. Evidemment, au vingt-et-unième siècle, on n'est plus obligé de faire les émulsions au fouet, ni au pilon : un bon mixer électrique fait l'affaire. Au fait, combien d'huile pour un chou-fleur ? L'idée à garder en tête, c'est qu'une émulsion peut s'obtenir jusqu'à 95 pour cent d'huile pour 5 pour cent d'eau. Or un chou fleur contient environ 85 pour cent d'eau. Après, à vous
vendredi 31 mars 2017
Les ollis, d'où le chou-fleur-olli
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