Des étudiants m'interrogent pour faire de l'agneau végétarien (je change l'intitulé de leur demande pour ne pas les mettre dans l'embarras). Cela me fait penser aux innombrables demandes de "pain sans gluten", de "blanc en neige sans oeuf", de "béarnaise sans beurre"...
Souvent, ces demandes sont légitimes. Par exemple, on "comprend" que des personnes intolérantes au gluten veuillent du pain sans gluten (on comprend... ou pas : pourquoi ne pas manger alors autre chose que du pain, puisque ce dernier contient précisément du gluten, par définition), que des personnes au régime ne veulent pas de beurre dans les béarnaises (ouais... si elles sont au régime : pas de mauvaise foi ; qu'elles mangent autre chose)...
Mais de l'agneau végétarien ? C'est une drôle de tournure d'esprit que de refuser de manger de la viande, mais en vouloir quand même !
De surcroît, ceux qui me demandent de l'agneau végétarien ont pour objectif de devenir ingénieurs dans l'industrie alimentaire. Ils cherchent à mettre un tel produit parce que le marketing leur a demandé. Mais faut-il vraiment faire tout ce que l'on vous demande sous prétexte qu'on vous le demande ? En 1939, cela a conduit à dénoncer les Juifs aux Nazis !
Luttons, donc, contre un certain marketing qui demande n'importe quoi, ou même contre les "consommateurs" (disons plus justement : les citoyens) analysons les demandes qui nous sont faites, avant de nous lancer dans des réalisations hasardeuses.
Hasardeuses, oui : car du pain sans gluten, ce n'est pas du pain ; de la béarnaise sans beurre, ce n'est pas de la béarnaise (même si le Codex alimentarius, parfois imbécile, l'admet... ce qui doit être combattu vigoureusement) ; de l'agneau végétarien, ce n'est pas de l'agneau.
Derrière beaucoup de ces questions, il y a soit le "carré rond", soit la déloyauté !
Or la loi de 1905 demande très justement des produits "sains, loyaux, marchands".
Afficher le mot "agneau" quand il n'y en a pas, c'est déloyal.
Techniquement, aussi, c'est idiot de se lancer dans la confection d'un agneau végétarien, par exemple, parce que le produit réalisé sera comparé à de l'agneau... et il ne sera jamais qu'une "copie". Par principe, il ne sera pas identique, n'ayant soit pas la même consistance, soit pas la même saveur, soit pas la même odeur. Et même si l'on parvient à quelque chose de très proche, même si des "consommateurs" (mot détestable) s'y trompent, on les aura... trompés !
Il y a plusieurs années, j'avais ainsi produit de la "béarnaise de chocolat", en remplaçant le beurre par le chocolat, dans un système alimentaire de structure analogue à celle de la béarnaise. Je me suis repris : le mot "béarnaise" ne devait pas être prononcé (c'est un "obernai"). De même, si l'industrie alimentaire introduit un produit nouveau, éventuellement très intéressant, elle ne doit pas être autorisée à le nommer en référence à un produit classique, sous peine de déloyauté.
D'ailleurs, n'est-ce pas une bien meilleure stratégie que d'introduire de nouveaux noms ? Au lieu que le produit soit comparé (défavorablement par principe) à l'original, on montre de l'innovation.
Et puis, c'est tellement plus droit, plus loyal !