dimanche 14 mai 2017

Les émulsions sont instables


Partons d'un bon pied, tout d'abord  : une émulsion, ce n'est pas une mousse. Je prends la précaution de le signaler, car on sait que certains professionnels du monde culinaire confondent, ayant eu une formation fautive. Une mousse ? Un liquide ou un solide où sont dispersées des bulles de gaz. Pensons à la mousse de savon, à la mousse de polyuréthane, au blanc d'oeuf battu en neige, au pain, à la brioche... Et, en revanche, les émulsions sont les systèmes où un liquide est dispersé sous la forme de gouttelettes dans un autre liquide, auquel il ne se mélange pas. Par exemple, on peut produire une émulsion de type huile dans eau, en fouettant de l'huile dans de l'eau où l'on a mis des protéines, par exemple, mais on peut aussi produire une émulsion eau dans huile, en s'y prenant bien.
Souvent, toutefois, les systèmes culinaires ne sont pas des mousses pures, ou des émulsions pures, et seules quelques préparations telles la mayonnaise ou l'aïoli sont des émulsions pures.  Ainsi, contrairement à ce que l'on enseigne depuis longtemps, la hollandaise ou la béarnaise ne sont pas des émulsions, mais surtout des "suspensions", en raison de la coagulation des protéines du jaune d'oeuf, laquelle produit des petits agrégats qui sont principalement responsables de la viscosité particulière de la sauce ; l'émulsification du beurre fondu se fait par surcroît... mais il n'est pas dit que le beurre reste liquide, à  la température où elle est servie, et, de ce fait, une partie de la matière grasse liquide est le plus souvent solidifiée, ce qui contribue à la composante "suspension", au détriment de la composante "émulsion".
La crème fouettée ? C'est d'abord de la crème, avec de la matière grasse dispersée dans de l'eau. Serait-ce une émulsion ? Si l'on sort la crème du réfrigérateur, il est probable que l'essentiel de la matière grasse soit sous la forme solide, et non liquide, de sorte que la crème serait plutôt une suspension qu'une émulsion. Puis on la fouette, ce qui signifie que l'on fait foisonner la crème, qu'on disperse des bulles d'air comme pour une mousse. De sorte que l'on a un système entre la suspension, la mousse et l'émulsion. Combien de chaque ? Cela dépend de la température, mais on peut imaginer que la composante "émulsion" est faible.

Limitons-nous donc aux émulsions, telles la mayonnaise ou l'aïoli. Sont-elles stables ? Quand elles sont un peu liquides, avec des gouttes d'huile qui ont la possibilité de bouger, elles ne sont certainement pas stables. D'ailleurs, on les voit crémer en quelques heures.



En revanche, quand elles sont énergiquement battues, et que les gouttelettes d'huile sont très petites, et coincées les unes contre les autres, alors le crémage est ralenti : j'ai mesuré quelques millimètres d'huile ayant crémé pour une mayonnaise stockée pendant un mois au réfrigérateur. C'est plus stables, mais ce n'est pas parfaitement stables.


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