Hier, j'ai braisé un jarret, en suivant une recette que j'avais trouvée en ligne, et qui m'étonnait. J'avais raison d'être étonné : le résultat était médiocre. N'est-il pas, constamment, plus intéressant de mettre en oeuvre ce que nous avons entre les deux oreilles ?
Raisonnons : le jarret, c'est de la chair, de l'os, de la couenne. On ne mange pas l'os (quoi que...) ; on déguste la chair ; et il faut considérer la couenne avec attention, comme on le verra. Examinons la cuisson des trois, séparément, avant d'arriver à une idée raisonnable de la cuisson du jarret total.
D'abord, l'os : il est bon de savoir que, dans la cuisson du pied de porc à la Sainte Menehould, la cuisson est si longue (jusqu'à trois jours à petit frémissement) que l'on peut même manger les os, les écraser sur du pain avec la moelle qu'ils contiennent. Pour du jarret, les os sont trop gros pour obtenir le même résultat, mais on peut espérer en libérer des élements nutritifs qui iront embellir le bouillon... à condition que les os libèrent effectivement quelque chose, en toute généralité : des tests restent à faire, et je vais les programmer pour un de mes prochains séminaires.
Pour la couenne, observons que c'est de la peau raclée, avec certainement de la matière grasse et du tissu collagénique. La graisse fond, vient surnager quand on cuit dans l'eau, tandis que le tissu collagénique gélifie à la cuisson, libérant de la gélatine, qui vient donner de l'onction au bouillon. Pour obtenir ce résultat, il faut une cuisson très longue...
... et cela impose alors que la cuisson soit à basse température, sans quoi la chair cuite longtemps serait fibreuse et trop sèche, pour des raisons que j'ai déjà souvent expliquées. Toutefois, ici, puisqu'il est question de porc, n'oublions pas que des parasites peuvent être présents, et qu'une température de 85 degrés est prudente. Là, la cuisson peut être longue, très longue, car l'état de cuisson dépendra de la plus haute température atteinte.
Tout cela étant analysé, on n'oubliera pas qu'il s'agit d'un braisage, opération qui se fait en deux temps : d'abord une cuisson à température soutenue, pour brunir la surface et donner du goût, puis la cuisson plus douce qui vient parachever le braisage. Pendant cette seconde étape, il faut ajouter un liquide : bouillon, vin, alcool... La cuisson se fait en milieu clos, de sorte qu'il y aura lieu, finalement, de réduire le jus formé, en le récupérant dans une casserole à part et en le faisant bouillir jusqu'elle soit nappante. Cela prend encore une bonne heure.
Bref, un jarret ne se fait pas le jour où on le sert : il faut s'y prendre bien à l'avance pour l'avoir bon !
dimanche 7 mai 2017
Un jarret braisé
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