vendredi 11 décembre 2015

A propos de gougères


Ce matin, une question amusante  m'arrive par email :

J'ai remarqué que vous aimez bien expliquer les réactions qui se passe dans un produit.
J'aurais aimé savoir si vous aviez un peu de temps à me consacrer pour m'expliquer comment obtient on  des "gougères" car je suis en train de travailler sur ce sujet pendant mon stage.
Si je comprends bien c'est la vapeur d'eau qui fais qu'un chou augmente son volume ? Faut-il avoir une perte d'eau importante ? Si elle est trop importante le chou gonflera-t-il comme même ?
De plus, est-il nécessaire d'avoir un déssèchement de la pâte. Mais  ne serait-il pas possible de créer une pâte à chou sans déssèchement mais en ayant une teneur d'eau optimal et la faire au "Cooking Chef" ?


Tout d'abord, je ne sais pas si "j'aime expliquer" les réactions qui se passent dans les produits. Disons plutôt que mon objectif est d'identifier  des mécanismes et des phénomènes inédits, à partir des transformations culinaires. Il s'agit donc d'une question scientifique (je répète que la gastronomie moléculaire est une discipline scientifique, et non pas de la technologie), et pas technologique, mais  il est exact que la technologie bénéficie nécessairement des résultats scientifiques.

D'autre part, du temps à consacrer à quelqu'un qui étudie les gougères ? Non, je n'ai pas de temps pour cela, parce que ces demandes individuelles m'arrivent environ 30 fois par jour, et ma mission de service public ne consiste pas à faire des assistances techniques particulières... d'où des réponses collectives, que je fais ici, donc.

Les gougères, enfin ? La question est traitée en détail dans mon livre Révélations gastronomiques. Cela dit, je peux ajouter quelques points ici.

Oui, c'est bien l'eau qui s'évapore au contact de la plaque de cuisson qui fait gonfler les choux... puisque, en réalité, les gougères ne  sont autres que des choux au fromage.

 "Faut-il avoir une perte d'eau importante ?" : la question est étrangement posée... surtout, il y a ce "il faut", qui s'apparente à "on doit", qui cache souvent l'essentiel. Il faudrait cela pourquoi ? Sans savoir ce que pense mon interlocuteur à ce sujet, disons que s'il y a évaporation de l'eau, alors le chou gonfle, et le gonflement est d'autant plus grand que plus d'eau s'évapore... à condition que la vapeur soit retenue par la croûte supérieure.

La question est la suivante : les choux subissent à la fois ce gonflement, en raison d'une évaporation de la base, mais  aussi  un croûtage de la surface supérieure, d'une migration des bulles de vapeur dans la masse (comme dans  un soufflé, où, à travers la porte vitrée du four, on voit les bulles crever à la surface), et d'une coagulation de la masse, en raison de la présence de l'oeuf.
Et l'on se reportera à deux séminaires de gastronomie moléculaire de 2015, que  nous avons consacrés aux gougères : [http://www.agroparistech.fr/Les-seminaires-de-gastronomie,3092.html.->http://www.agroparistech.fr/Les-seminaires-de-gastronomie,3092.html] Les comptes rendus sont sur ce site, et l'on peut s'inscrire, pour les recevoir automatiquement, en envoyant un email à icmg@agroparistech.fr.

 Est-il nécessaire d'avoir un dessèchement de la panade ? Cela n'est pas clair, à ce jour, et tout dépend notamment des proportions d'eau  et de farine de la panade. Surtout, le dessèchement permet d'introduire de l'oeuf tout en conservant une tenue qui évite l'étalement.

Vive l'Etude !


 














Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

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