Un message reçu ce matin :
Bonjour Mr THIS
je ne suis qu'un petit chocolatier mais j'aime comprendre ce que je fait et m'expliquer
chacuns de mes gestes.
J'ai lu un article qui parlait de la ganache. Moi aussi j'ai toujours parlé d'émulsion pour la ganache. J'ai aussi lu votre article et je ne vous cache pas que demain je vais essayer en réalisant mon mélange crème et chocolat a 34/35°C.
Beaucoup ajoute le beurre en fin de préparation. Certain dont je fait partie le fond fondre avec la crème.
Pouvez-vous me dire ce que vous préconisez et pourquoi?
Et ma réponse :
Cher Monsieur
Je ne sais pas bien ce qu'est un "petit chocolatier" : je connais des
chocolatiers qui font bien, et d'autres qui font moins bien, parce
qu'ils se donnent moins de mal, ou bien parce qu'ils utilisent des
produits moins bons.
Merci de me faire penser à la question : je crois que, pour le chocolat,
c'est comme pour la cuisine. Il y a une composante de lien social (le
bien fait, fini, léché, c'est une façon de dire "je t'aime), une
composante artistique (le dosage des ingrédients en vue de donner le
goût, avec des règles de construction du goût), et une composante
technique, la plus simple, au fond.
Tout cela fait l'objet de mon livre La cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique.
Pour les ganaches, il y a mille façons de faire, et la méthode à
employer détermine le résultat.
Ce qui est certain, c'est que,
finalement, on obtiendra une matière qui sera faite d'eau, de matière
grasse solide, d'un peu de matière végétale insoluble, et d'un fraction
de matière grasse liquide qui sera déterminée par la température de
service et par le type de matière grasse utilisée.
En effet, la matière grasse du chocolat est sous forme quasi entièrement
solide, à température de 20 °C, alors que la matière grasse du beurre
est elle, sous la forme mi solide, mi liquide (j'en fais un long
développement dans mon prochain livre). Et cela quelle que soit la
technique utilisée pour la ganache.
Si l'on part de crème, c'est qu'il y a de l'eau et de la matière grasse
laitière, sous la forme d'une émulsion. Quand on fait bouillir la crème, on conserve la structure
d'émulsion (du gras liquide dispersé dans l'eau, par définition du mot),
mais toute la matière grasse est liquide. Puis, quand on la met au
centre de la masse du chocolat, ce dernier fond (graisse devient
solide), tandis que le sucre se dissout dans l'eau de la crème. Selon la
façon de faire, on a des globules de matière grasse plus ou moins gros,
ce qui, d'ailleurs, a une relation avec la couleur de la masse.
Au refroidissement, la partie la moins fusible de la matière grasse resolidifie, formant une sorte d'échafaudage solide.
Fondre le beurre avec la crème ? C'est assez logique, puisque l'on
obtient alors une émulsion du même type que la crème. L'ajouter en fin
de préparation ? Pourquoi pas : je ne crois pas (mais il faudrait faire
une étude précise) que le moment d'incorporation soit important.
En revanche, le contrôle des températures me semble essentiel, parce
que, ce qui est à contrôler, c'est la recristallisation. J'aurais
tendance à dire que l'on doit avoir à l'esprit que plus la
cristallisation est lente, plus on risque de gros cristaux, sauf si l'on
agite vigoureusement, un peu comme le sorbet vs le granité. Mais il y a
aussi le risque d'agglomérer les cristaux déjà formés.
Bref, vous avez un beau métier !
lundi 31 décembre 2012
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