dimanche 1 mars 2015

Fail, learn, succeed


Notre monde est plein de slogans étranges, souvent en anglais (certains considèrent que cela fait plus chic... mais je n'arrive pas à les suivre, et je trouve surtout que cela fait plus snob, désolé). "Fail, learn succeed" fait partie de ces objets venus du  monde du marketing, du business (observez : deux mots anglais), et on leur prête (à beau mentir qui vient de loin) une sorte de modernité  terrible. 

Au point que des étudiants m'ont interrogé sur cette question : "Pourriez-vous nous raconter un épisode où vous avez raté, appris, réussi ? J'ai d'abord fait observer que le mot "learn" signifie apprendre, pas analysé, et que, en général, quand j'échoue, j'apprends moins que je n'analyse. C'est seulement ensuite, quand j'ai réussi, que j'ai  appris. 

Mais c'était en quelque sorte jouer  sur les mots, et il m'a bien fallu "plonger", chercher un exemple exemplaire, si l'on peut dire, de cas où il y eut un échec transformé en réussite. 

Echec, réussite ? Immédiatement, je traduis dans mon propre langage en "D'un petit mal, un grand  bien". Et je me souviens de ce jour où une viande  de civet avait  "tranché", s'était décomposée, était devenue grumeleuse. Impossible à servir ainsi ! 



Il fallait analyser : cette sauce avait bon goût, mais elle était  grumeleuse. Grumeleuse, cela signifie en réalité que la phase aqueuse comporte en suspension des particules solides, souvent  des protéines qui ont coagulé. 

Une première solution aurait consisté à diviser ces particules, car pour des diamètres inférieurs à 15 micromètres (millionièmes de mètre), les particules ne sont plus perceptibles (d'où le conchage du chocolat, opération qui consiste à broyer le sucre afin qu'il fasse de très  petites particules, d'où un chocolat très souple). 

Toutefois, il y avait le risque que l'aspect reste insatisfaisant, le manque  de temps. 

Pouvait-on faire plus rapide ? Une autre possibilité consistait à éliminer les particules, et non seulement les rendre invisibles. Les éliminer comment ? Par exemple par filtration... ou par distillation. Et c'est ainsi que fut produit une sauce analogue à un merveilleux cognac, ambrée, goûteuse, et limpide ! 



Qu'avons-nous appris, dans l'affaire ? Nous  nous sommes souvenus d'un adage, et, puisque nous l'avons présent à l'esprit, nous pourrons le mettre en oeuvre à nouveau  plus facilement, la prochaine fois. 









Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Souvent, les auteurs de commentaires ne laissent pas d'adresse email, et c'est bien dommage, parce que je ne peux répondre à des questions personnelles que par des messages collectifs. N'hésitez pas, simultanément, à m'envoyer un email à herve.this@paris.inra.fr