dimanche 23 février 2014

Séminaire de février 2014

Chers Amis
Permettez moi de vous rappeler que c'est demain, 24 février 2014, de 16 à 18 heures, au 28 bis rue de l'Abbé Grégoire (Ecole supérieure de cuisine française du Centre Jean Ferrandi de la Chambre de commerce de Paris) que nous aurons notre séminaire du mois de février (exceptionnellement le 4e lundi du mois, au lieu du 3e).
Le thème qui a été retenu par les participants du séminaire de janvier, pour notre séminaire de demain est :
Quelle est l'influence de la taille des morceaux de viande utilisés pour la confection d'un bouillon de boeuf ?
Quelle est l'influence des os ?

Au plaisir de retrouver ceux qui veulent+peuvent.

dimanche 16 février 2014

L'art culinaire ? De l'art !

Il n'y a pas de mal à dire du bien de ceux qui le méritent, n'est-ce pas?

Alors, aujourd'hui, j'ai le plaisir de raconter un événement tout à fait merveilleux, qui dit beaucoup de l'art culinair.

Cela s'est passé lors d'un "dîner moléculaire" qui a été servi il y a plusieurs années aux auditeurs de l'Institut des hautes études du goût, de la gastronomie et des arts de la table (c'était avant que soient servis des dîners note à note).
Pour ce repas, le pâtissier Nicolas Bernardé (il était alors chef-enseignant de l'Ecole du Cordon bleu) m'avait demandé quoi préparer, et je lui avais répondu que la technique devait venir en soutien de l'idée artistique, pas avant elle.
Pour l'aider à composer une oeuvre, je lui avais demandé ce qu'il aimait, et il me répondait en termes gourmands.
Pourquoi pas, mais j'avais poussé le questionnement, en lui demandait ce qui l'émouvait lui-même dans un ordre non gourmand, et il m'avait répondu qu'il se souvenait avec émotion de son grand-père qui l'emmenait en forêt ; il y avait ce moment essentiel où l'on entre dans la forêt, et où se dressent les troncs sombres, avec la lumière qui filtre encore entre eux, éclairant une mousse verte, sur le sol.
C'est cela dont il fallait donner l'émotion !

Le diner eut lieu, le dessert fit pleurer les convives. Vive l'art culinaire  







Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)






De la génoise sans oeuf ? Ce n'est pas de la génoise !

Aujourd'hui, je reçois une question :

Je vous contact dans le cadre d'une création de pâtisserie végétalienne. Nous nous  étions entretenus par téléphone et vous m'aviez donnez de précieux conseil pour la confection de macaron sans œufs. Serait-il possible de m' éclairer cette fois sur le moyen de remplacer les œufs dans une génoise ?




Et voici mon analyse :

 De la pâtisserie végétalienne ? J'ignore ce dont il s'agit, en réalité, parce que les particularités alimentaires sont par million.

Nous nous étions entretenus au téléphone à propos de macarons sans oeufs ? Je n'aurais pas dû : agent de l'Etat, je dois mon activité à l'ensemble des contribuables, et non à pas un en particulier.
En conséquence, j'ai fait une erreur, en prenant sur mon temps pour répondre à une seule personne, et j'aurais dû faire ce que je fais ici : donner le résultat à tous.

Des macarons sans oeufs : en réalité, ce n'est pas possible. C'est comme un carré rond. Si la recette des macarons comporte des oeufs, tout produit qui ne contient pas d'oeuf n'est pas un macaron. Dire "macaron sans oeuf", c'est comme dire "coq au vin sans coq".
Donc il faut un autre nom. Et comme j'ai proposé une recette à mon interlocuteur, surtout si la recette a bien fonctionné (il s'agissait de remplacer les protéines de l'oeuf par d'autres protéines foisonnantes ou coagulantes, telles les protéines de poisson, de viande, de végétaux (les pois contiennent beaucoup de protéines), je dois donner un nom au produit. Mieux encore, je propose un nom d'un chimiste qui a étudié les protéines, soit "berzélius", du nom du chimiste suédois qui a nommé les protéines.

La génoise sans oeuf ? Ce n'est pas une génoise, et, là encore, puisque les oeufs apportent la coagulation à la cuisson d'une mousse semi-liquide, la solution est identique à celle des macarons.






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

La sublimation


Partageons les questions qui m'arrivent par courriel.

L'une d'elle concernait la glace qui apparaît quand on stocke longtemps un produit dans un congélateur. Comment se forme-t-elle ? A partir du liquide qui « suinterait » des produits congelés (viande, poisson... ) ?

Non ! Le phénomène est merveilleux... et différent : il a pour nom « sublimation ». Evidemment, je ne vais pas faire ici un cours de physique, mais en profiter pour partager un émerveillement.


Reprenons avec un phénomène analogue, mais plus rapide et plus « visible » : on met quelques cristaux d'iode, comme du gros sel, mais violet, dans un petit bocal transparent, muni d'un couvercle, et l'on chauffe très doucement. Aucun liquide n’apparaît, tant que la température reste inférieure à 113,7°C, mais il y a, à la place, des fumées violettes, et l'on voit apparaître sur le couvercle de petits cristaux violets. L'iode (on devrait dire « le di-iode », puisque la molécule est formée de deux atomes d'iode) passe directement de l'états solide à l'état de vapeur, puis se recondense sur le couvercle.

Le même effet s'observe dans les congélateurs, mais bien plus lentement (parce que la température est bien plus basse, notamment). La température étant inférieure à la température de solidification (« congélation ») de l'eau, celle qui est  présente dans les aliments est sous la forme solide, mais en équilibre avec une certaine « pression de vapeur », et l'eau sous la forme de vapeur se recondense ailleurs, sous la forme de glace. On n'est pas dans les conditions où un liquide peut exister, et il n'existe pas.

Et voilà pourquoi la congélation, merveilleux système de conservation, n'est pas une panacée. D'ailleurs, quand on nous promet des panacées, doutons... et émerveillons-nous des phénomènes chimiques et physiques.






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

mercredi 12 février 2014

Une journée au laboratoire

bonne audition :
http://www.lemouv.fr/diffusion-herve-this-inventeur-de-la-gastronomie-moleculaire

Emission sur le goût

Bonjour,

Une émission sur le goût sera diffusée ce soir à 19h sur la radio Prun'. Vous pourrez l'écouter en direct sur Internet via ce lien http://www.prun.net/emissions/le-labo-des-savoirs-12022014, en cliquant sur le bouton de lecture tout en haut de l'écran.

Sur cette page, vous pourrez aussi télécharger l'émission en mp3 à partir de demain.

Cette émission sera aussi diffusée sur  l'Autre radio à Château Gonthier et sur Radio G à Angers.

dimanche 9 février 2014

Les jurys de thèse


Récemment, à l'occasion d'une soutenance de thèse, les membres du jury (qui se rencontraient parfois pour la première fois) étaient si heureux d'avoir la possibilité d'une discussion scientifique que, lors du déjeuner qui a précédé la soutenance (pas d'alcool : nous voulions avoir l'esprit absolument clair), nous avions résolu que, puisque la thèse était excellente, puisque le document était remarquable, nous pourrions passer à un exercice plus intéressant que le questionnement du candidat, et nous pourrions notamment utiliser les questions comme un moyen de se parler, entre membres du jury. 
 
Cela s'est révélé une mauvaise idée, car notre enthousiasme pour la science nous a conduit à confisquer l'après soutenance, voire à détourner la conversation sur des sujets un peu éloignés de ceux qui avaient été étudiés dans le cadre de la thèse. Notre futur nouveau docteur était même un peu exclu !
Nous nous en sommes aperçus rapidement, et nous avons mis fin au jeu que nous avions déterminé.

Décidément, l'enfer est pavé de bonnes intentions... et nous devons chasser le diable de tous nos actes, paroles, pensées !

lundi 3 février 2014

La peur déraisonnée commence au café !

Des amis m'interrogent : le chauffage des aliments au four à micro-ondes est-il dangereux pour la santé ?


D'abord, un peu de recul : quand le train a été introduit, on craignait... tout ! Qu'il fasse tourner le lait des vaches, qu'il... La peur.

Puis il y eut des querelles terribles à propos du "plus lourd que l'air". Il était évidemment impossible qu'il volerait... mais, au fait, les oiseaux ne sont-ils pas plus "lourds que l'air" (questionnons l'expression une autre fois). Et il a volé.

Le micro-ondes, même histoire : les micro-ondes feraient tourner les molécules à l'envers, par exemple (utiliser une telle expression montre que l'on ne comprend pas ce que l'on dit ; d'ailleurs, les molécules s'en moquent, de tourner dans un sens ou dans un autre sens).

D'ailleurs, la "preuve" (pardon : j'ai omis de dire que tout ce billet est évidemment écrit au second degré, merci de ne pas prendre mes phrases dans leur sens littéral ; je sais, c'est sans doute une erreur de faire ainsi), n'est-ce pas, dès le matin, dans la tasse de café ?


L'expérience qui fait peur : vous mettez de l'eau dans une tasse, et vous chauffez à pleine puissance. L'eau bout, vous retirez la tasse. Puis vous mettez un morceau de sucre et... PSHOUTTTTTTT ! Une grosse ébullition survient, et certains disent même que l'eau peut vous jaillir au visage... mais je n'ai encore jamais réussi à obtenir un tel effet !


Ensuite, pourquoi ce phénomène ? Toute personne qui ne questionne pas D'ABORD le phénomène de façon physique est conduite à imaginer tout et n'importe quoi, alors que le phénomène est simple : il tient au fait que la formation des bulles se fait sur des "aspérités", tels les grains de sucre, ou des grains de sel, ou de sable. Evidemment, plus il y a de grains, et plus le phénomène est visible, et c'est ainsi que je vous invite à expérimenter avec des sables de différentes granularités.

C'est amusant (intéressant, si l'on préfère), et, progressivement, on perd sa peur parce que l'on acclimate le phénomène étrange. En gros, on devient moins bête. Cela ne peut-il devenir un objectif louable ?






Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la  jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

dimanche 2 février 2014

La tendreté des pâtes cuites

Tiens, nous cuisons une flammkuecha ou une pissaladière, voire une pizza, c'est-à-dire une couche de pâte, obtenue par mélange de farine et d'eau.
Nous avons utilisé un rouleau ou un autre instrument afin d'obtenir une épaisseur assez régulière. Cette pâte, éventuellement avec une garniture, est placée dans un four très chaud, par exemple  200 °C.

A cette température, les parties externes de la pâte ont leur eau qui s'évapore, ce qui produit un croûte croquante. À l'intérieur, la température reste toujours inférieure à 100°, parce que, tant qu'il y a de l'eau, la température ne peut guère augmenter (au mieux quelques degrés, parce que cette eau n'est pas pure, mais contient des "solutés", des composés dissous*).

La chaleur arrive donc à la surface, et de l'eau s'évapore donc de la partie supérieure et de la  partie inférieure de la pâte, tandis que la tendreté du centre subsiste.

Je  propose un exercice aux amateurs de sciences de la nature, un petit calcul : connaissant les lois classiques de transfert de la chaleur, connaissant la température du four, connaissant la chaleur latente d'évaporation de l'eau (combien il faut d'énergie pour évaporer une masse d'eau donnée, à la température de 100 °C),  pouvons-nous calculer quel sera, après 10 minutes de cuisson par exemple, l'épaisseur des croûtes inférieure et supérieure ?

La réponse à  la question est intéressante, parce que si l'épaisseur totale de la pâte est inférieure à la somme de ces deux épaisseurs,  alors nous obtiendrons une couche de pâte entièrement croquante ;  en revanche, si l'épaisseur totale est supérieure à la somme des deux épaisseurs, alors nous ferons un coeur tendre entre deux couches croquantes.

En pratique, les cuisiniers répondent à la question par l'expérience, mais les étudiants en physico-chimie obtiendront facilement le résultat par un simple calcul.  Et puis ? Ce type de problème ne conduit-il pas à l'étude de la physico-chimie ? A la connaissance par la gourmandise ?



* A titre indicatif, quand on fait bouillir 200 g d'eau additionnés de 200 g de sel, la température d'ébullition de l'eau n'est pas de 100 °C, mais de 103 °C ; pas de quoi fouetter un chat.







Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)